La surprise Patrice Motsepe, de Soweto au sommet du football africain

Enfant de Soweto devenu milliardaire, Patrice Motsepe s’apprĂŞte Ă devenir vendredi le nouveau roi du football africain en dĂ©pit de son profil relativement inconnu du monde sportif hors d’Afrique du Sud, oĂą il incarne cette Ă©lite noire sud-africaine qui a prospĂ©rĂ© après l’apartheid.
Candidat surprise adoubĂ© par la Fifa et seul encore en lice, le futur prĂ©sident de la ConfĂ©dĂ©ration africaine de football (CAF) sera vraisemblablement, sans grand suspense, Ă©lu lors de l’assemblĂ©e gĂ©nĂ©rale de l’organisation Ă Rabat au Maroc.
Dixième plus grosse fortune d’Afrique, parmi les trois Sud-Africains les plus riches avec un patrimoine estimĂ© Ă environ 2,5 milliards d’euros, selon le magazine amĂ©ricain Forbes, le self-made man de 59 ans au look soignĂ© a fait fortune dans l’industrie minière et la finance mais cultive une certaine discrĂ©tion.
Après avoir laissĂ© un autre annoncer officiellement sa candidature en novembre, isolĂ© Ă cause de soupçons de Covid-19, il a observĂ© un silence mĂ©diatique jusqu’Ă l’annonce de son programme… il y a deux semaines.
Et pour toute explication sur ses motivations Ă s’engager Ă la tĂŞte de la CAF, l’homme d’affaires et fin stratège a simplement dĂ©clarĂ©: “J’aime le football. Un amour stupide et irresponsable”.
Patrice Motsepe faisait figure d’outsider face Ă ses trois rivaux pour la course Ă la prĂ©sidence, l’Ivoirien Jacques Anouma, le SĂ©nĂ©galais Augustin Senghor et le Mauritien Ahmed Yahya, tous prĂ©sidents ou anciens prĂ©sidents de fĂ©dĂ©rations dans leur pays.
Une campagne électorale minimaliste lui a permis de rencontrer des dirigeants qui voteront vendredi, et dont certains ont avoué en coulisses ne pas savoir qui il était avant de le rencontrer.
– Fortune dans l’or –
D’autres se sont Ă©tonnĂ©s de sa connaissance succincte des enjeux de la CAF pour les quatre annĂ©es Ă venir…
Mais il bĂ©nĂ©ficie du prĂ©cieux soutien du prĂ©sident de la fĂ©dĂ©ration du Nigeria, Amaju Pinnick, qui l’a introduit auprès de ses confrères.
Plus connu pour sa rĂ©ussite en affaires, Patrice Motsepe a grandi dans le township de Soweto, près de Johannesburg. Ses parents, commerçants, l’inscrivent dans une Ă©cole privĂ©e catholique et lui permettent de poursuivre Ă l’universitĂ© oĂą il Ă©tudie le droit minier, les affaires et l’art.
A la fin de l’apartheid, il devient le premier associĂ© noir dans un cabinet d’avocats en Afrique du Sud. Profitant du nouveau souffle dans la nation arc-en-ciel et de l’effondrement du cours de l’or, il achète plusieurs mines Ă bon prix Ă la fin des annĂ©es 90.
En 1997, il crĂ©e l’entreprise African Rainbow Minerals Gold Limited, spĂ©cialisĂ©e dans l’extraction du cuivre, du platine, du fer ou encore du charbon.
Mais sa fortune lui permet aussi de s’offrir en 2004 un club de foot: les Mamelodi Sundows. L’Ă©quipe de Pretoria a depuis remportĂ© une Ligue des champions d’Afrique en 2016 et conquis sept titres de champion d’Afrique du Sud.
Le magnat des mines possède Ă©galement une participation de 37% dans l’Ă©quipe de rugby la plus titrĂ©e du pays, les Bulls de Pretoria.
Mais l’emploi du temps surchargĂ© de ce businessman fait craindre qu’il ne puisse s’investir Ă fond auprès de la CAF.
– Beau-frère du prĂ©sident –
“Il n’a mĂŞme pas le temps de s’occuper de son club”, regrette Bacary CissĂ©, rĂ©dacteur en chef du journal sĂ©nĂ©galais Record. Pour lui, Motsepe est “parachutĂ©, mais la Fifa a fait de lui une arme redoutable”.
Gianni Infantino, patron du foot mondial, a poussĂ© la candidature du Sud-Africain, et de nombreuses voix en Afrique crient Ă l’ingĂ©rence.
“Mais la Fifa ne pourra pas le manipuler comme une marionnette ou un +yes-man+”, assure Mamadou Gaye, analyste de l’Ă©mission SuperSport’s Soccer Africa.
MariĂ©, père de trois garçons, l’homme d’affaires est aussi le beau-frère du prĂ©sident sud-africain Cyril Ramaphosa.
Sa s½ur Tshepo est mariĂ©e Ă l’actuel chef d’État et son autre s½ur Bridgette est l’Ă©pouse de Jeff Radebe, membre du parti historique au pouvoir, le Congrès national africain (ANC).
A la tĂŞte d’une fondation qui porte son nom, il s’est engagĂ© en 2013 Ă faire don de la moitiĂ© de sa fortune Ă des ½uvres caritatives dans le cadre de la campagne “The giving Pledge” (promesse de don) lancĂ©e par Warren Buffet et Bill Gates.
Et le richissime homme d’affaires a, comme d’autres, promis un milliard de rands (55,7 millions d’euros) pour lutter contre la pandĂ©mie de coronavirus en Afrique.